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Emile Verhaeren

Moine sauvage

On trouve encor de grands moines que l'on croirait
Sortis de la nocturne horreur d'une forêt.

Ils vivent ignorés en de vieux monastères,
Au fond du cloître, ainsi que des marbres austères.

Et l'épouvantement des grands bois résineux
Roule avec sa tempête et sa terreur en eux.

Leur barbe flotte au vent comme un taillis de verne,
Et leur oeil est luisant comme une eau de caverne.

Et leur grand corps drapé des longs plis de leur froc
Semble surgir debout dans les parois d'un roc.

Eux seuls, parmi ces temps de grandeur outragée,
Ont maintenu debout leur âme ensauvagée ;

Leur esprit, hérissé comme un buisson de fer,
N'a jamais remué qu'à la peur de l'enfer ;

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Mourir

Un soir plein de pourpres et de fleuves vermeils
Pourrit, par au-delà des plaines diminuées,
Et fortement, avec les poings de ses nuées,
Sur l'horizon verdâtre, écrase des soleils.
Saison massive! Et comme Octobre, avec paresse
Et nonchaloir, se gonfle et meurt dans ce décor
Pommes ! caillots de feu ; raisins ! chapelets d'or,
Que le doigté tremblant des lumières caresse,
Une dernière fois, avant l'hiver. Le vol
Des grands corbeaux ? il vient. Mais aujourd'hui, c'est l'heure
Encor des feuillaisons de laque - et la meilleure.

Les pousses des fraisiers ensanglantent le sol,
Le bois tend vers le ciel ses mains de feuilles rousses
Et du bronze et du fer sonnent, là-bas, au loin.
Une odeur d'eau se mêle à des senteurs de coing
Et des parfums d'iris à des parfums de mousses.
Et l'étang plane et clair reflète énormément
Entre de fins bouleaux, dont le branchage bouge,
La lune, qui se lève épaisse, immense et rouge,

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La vie

Il faut admirer tout pour s'exalter soi-même
Et se dresser plus haut que ceux qui ont vécu
De coupable souffrance et de désirs vaincus :
L'âpre réalité formidable et suprême
Distille une assez rouge et tonique liqueur
Pour s'en griser la tête et s'en brûler le coeur.

Oh clair et pur froment d'où l'on chasse l'ivraie !
Flamme nette, choisie entre mille flambeaux
D'un légendaire éclat, mais d'un prestige faux !
Dites, marquer son pas dans l'existence vraie,
Par un chemin ardu vers un lointain accueil,
N'ayant d'autre arme au front que son lucide orgueil !

Marcher dans sa fierté et dans sa confiance,
Droit à l'obstacle, avec l'espoir très entêté
De le réduire, à coup précis de volonté,
D'intelligence prompte ou d'ample patience
Et de sentir croître et grandir le sentiment
D'être, de jour en jour, plus fort, superbement.

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La neige

La neige tombe, indiscontinûment,
Comme une lente et longue et pauvre laine,
Parmi la morne et longue et pauvre plaine,
Froide d'amour, chaude de haine.

La neige tombe, infiniment,
Comme un moment -
Monotone - dans un moment ;
La neige choit, la neige tombe,
Monotone, sur les maisons
Et les granges et leurs cloisons ;
La neige tombe et tombe
Myriadaire, au cimetière, au creux des tombes.

Le tablier des mauvaises saisons,
Violemment, là-haut, est dénoué ;
Le tablier des maux est secoué
A coups de vent, sur les hameaux des horizons.

Le gel descend, au fond des os,

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La vachère

Le mouchoir sur la nuque et la jupe lâchée,
Dès l'aube, elle est venue au pacage, de loin ;
Mais sommeillante encore, elle s'est recouchée,
Là sous les arbres, dans un coin.

Aussitôt elle dort, bouche ouverte et ronflante ;
Le gazon monte, autour du front et des pieds nus ;
Les bras sont repliés de façon nonchalante,
Et les mouches rôdent dessus.

Les insectes de l'herbe, amis de chaleur douce
Et de sol attiédi, s'en viennent, à vol lent,
Se blottir, par essaims, sous la couche de mousse,
Qu'elle réchauffe en s'étalant.

Quelquefois, elle fait un geste gauche, à vide,
Effarouche autour d'elle un murmure ameuté
D'abeilles ; mais bientôt, de somme encore avide,
Se tourne de l'autre côté.

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Silencieusement

En un plein jour, larmé de lampes,
Qui brûlent en l'honneur
De tout l'inexprimé du coeur,
Le silence, par un chemin de rampes,
Descend vers ma rancoeur.
Il circule très lentement
Par ma chambre d'esseulement ;
Je vis tranquillement en lui ;
Il me frôle de l'ombre de sa robe ;
Parfois, ses mains et ses doigts d'aube
Closent les yeux de mon ennui.
Nous nous écoutons ne rien dire.

Et je rêve de vie absurde et l'heure expire.

Par la croisée ouverte à l'air, des araignées
Tissent leur tamis gris, depuis combien d'années ?

Saisir le va-et-vient menteur des sequins d'or
Qu'un peu d'eau de soleil amène au long du bord,

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Les paysans

Ces hommes de labour, que Greuze affadissait
Dans les molles couleurs de paysanneries,
Si proprets dans leur mise et si roses, que c'est
Motif gai de les voir, parmi les sucreries
D'un salon Louis-Quinze animer des pastels,
Les voici noirs, grossiers, bestiaux - ils sont tels.

Entre eux, ils sont parqués par villages : en somme,
Les gens des bourgs voisins sont déjà l'étranger,
L'intrus qu'on doit haïr, l'ennemi fatal, l'homme
Qu'il faut tromper, qu'il faut leurrer, qu'il faut gruger.
La patrie ? Allons donc ! Qui d'entre eux croit en elle ?
Elle leur prend des gars pour les armer soldats,
Elle ne leur est point la terre maternelle,
La terre fécondée au travail de leurs bras.
La patrie ! on l'ignore au fond de leur campagne.
Ce qu'ils voient vaguement dans un coin de cerveau,
C'est le roi, l'homme en or, fait comme Charlemagne
Assis dans le velours frangé de son manteau ;
C'est tout un apparat de glaives, de couronnes,

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Aprement

Le jour
Ils se croisaient dans leur étable et dans leur cour,
Leurs durs regards obstinément fixés à terre ;
Et tous les deux, ils s'acharnaient à soigner mieux,
Elle, ses porcs, et lui, ses boeufs,
Depuis qu'ils se boudaient, rogues et solitaires.

Ils s'épiaient du coin de l'oeil, dans leur enclos,
Avec l'espoir secret de se surprendre en faute.
Mais elle était toujours de corps ferme et dispos
Et lui travaillait dur et tenait la main haute
Sur la grange et le champ.

Ils se mouvaient, pareils à deux blocs de silence,
Faits de sourde rancune et d'âpre violence :
Aux trois repas, ils attablaient, farouchement,
Face à face, leur double entêtement.
Ils gloutonnaient, à bouche pleine,
Leur pain compact
Réglant leurs coups de dents sur le tic tac exact

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Il fait novembre en mon âme

Rayures d'eau, longues feuilles couleur de brique,
Par mes plaines d'éternité comme il en tombe !
Et de la pluie et de la pluie - et la réplique
D'un gros vent boursouflé qui gonfle et qui se bombe
Et qui tombe, rayé de pluie en de la pluie.

- Il fait novembre en mon âme -
Feuilles couleur de ma douleur, comme il en tombe !

Par mes plaines d'éternité, la pluie
Goutte à goutte, depuis quel temps, s'ennuie,
- Il fait novembre en mon âme -
Et c'est le vent du Nord qui clame
Comme une bête dans mon âme.

Feuilles couleur de lie et de douleur,
Par mes plaines et mes plaines comme il en tombe ;
Feuilles couleur de mes douleurs et de mes pleurs,
Comme il en tombe sur mon coeur !

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Dialogue

... Sois ton bourreau toi-même
N'abandonne le soin de te martyriser
A personne, jamais. Donne ton seul baiser
Au désespoir ; déchaîne en toi l'âpre blasphème ;
Force ton âme, éreinte-la contre l'écueil :
Les maux du coeur qu'on exaspère, on les commande ;
La vie, hélas ! ne se corrige ou ne s'amende
Que si la volonté la terrasse d'orgueil.
Sa norme est la douleur. Hélas ! qui s'y résigne ?
- Certes, je veux exacerber les maux en moi.
Comme jadis les grands chrétiens, mordus de foi,
Se torturaient avec une ferveur maligne,
Je veux boire les souffrances, comme un poison
Vivant et fou ; je cinglerai de mon angoisse
Mes pauvres jours, ainsi qu'un tocsin de paroisse
S'exalte à disperser le deuil sur l'horizon.

Cet héroïsme intime et bizarre m'attire :
Se préparer sa peine et provoquer son mal
Avec acharnement, et dompter l'animal

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